Un groupe de 106 universitaires, tels qu’ils se présentent, sur des centaines de milliers que compte la République, viennent de publier une déclaration politique intitulée « MANIFESTE DES UNIVERSITAIRES CONGOLAIS AU SUJET D’UN 3ème MANDAT PRESIDENTIEL CONSTITUTIONNEL E EN RDC ». Parmi les 106 universitaires, on peut citer 4 éminents professeurs de Droit Public, constitutionnalistes de surcroît. À savoir les Professeur Ntumba Luaba, Jacques Ndjoli, André Mbata et Tasoki Manzele.
Comble de déception, toute cette matière grise n’a été incapable de rencontrer les différents moyens de droit que constitue l’ossature de l’argumentaire de la thèse de leur collègue Chef de Travaux, Jean Cyrus Mirindi. Le recours en désespoir de cause par les signataires du manifeste au militantisme et au discours extrémiste démontre, jusqu’à preuve du contraire, de la pertinence en béton de la thèse développée par notre compatriote.
Ainsi, la possibilité est donnée à l’actuel chef de l’État de briguer un deuxième et dernier mandat, conformément à la constitution, telle que révisée par la loi du 20 janvier 2011. En tout d’état de cause, face à cette réalité, la raison et le droit étant désormais du côté de Joseph KABILA, personne ne sera fondé d’ameuter le peuple pour des motifs non avoué de positionnement individuel.
DU POINT DE VUE SCIENTIFIQUE, LE DÉBAT EST DONC DÉFINITIVEMENT CLOS.
DÉBAT SCIENTIFIQUE DÉLIBÉRÉMENT ÉLUDÉ, FAUTE D’ARGUMENTS
Ledit manifeste serait passé inaperçu et versé dans la poubelle de la spéculation politiciennes s’il n’avait attiré l’attention sur la qualité des auteurs qui s’affichent comme des universitaires et non comme politiciens. De même, le fait d’évoquer en primeur la réflexion scientifique soulevée par un autre universitaire, en l’occurrence le Chef de Travaux Jean Cyrus MIRINDI, donnerait à penser à une bienvenue contribution scientifique de la part des pairs intellectuels dans le seul but de faire jaillir la lumière. Bien entendu, allusion est manifestement faite à la controverse que cet autre universitaire a balancée sur la place publique, suite à la modification constitutionnelle intervenue le 20 janvier 2011. Cependant, à la lecture du texte dudit manifeste, on ne relève nulle part une démonstration cartésienne mettant à l’avant une analyse croisée et technique de la thèse du CT Jean Cyrus MIRINDI, laissant ainsi en souffrance l’absence regrettable de contradiction à l’issue d’une sortie qui, à l’annonce, a laissé espérer à un véritable choc des idées.
Le malheur dans cette sortie ratée, c’est que les signataires de ce manifeste ont plus laissée éclater le contenu de leur cœur que le fruit de leur cerveau. Les références faites abondamment aux dispositions constitutionnelles dans le fameux manifeste donne à croire à un chapelet de simples affirmations de ce que d’aucun peut aisément lire avec la compréhension superficielle du congolais lambda et non avec le cerveau d’un professionnel du Droit.
Une telle carence dans le débat me parait inadmissible dès lors que l’honnêteté intellectuelle aurait recommandé aux signataires de la manifeste de s’incliner face à la vérité, qu’elle vienne d’un adversaire politique ou non, dès lors qu’on n’est pas en mesure d’opposer un avis contraire dument argumenté.
CHAPELETS D’AFFIRMATIONS GRATUITES ET DES HERISIES DIFFICILE À SOUTENIR
Je comprendrais les motivations des auteurs à réclamer une transition citoyenne à l’effet de contourner les élections. Cependant, je trouve malsain que des scientifiques assignés à la rigueur et à l’obligation de la logique formelle reprennent naïvement et du mot à mot des propos ramassés dans les joutes de politique politicienne.
En effet, ces universitaires se permettent sans vergogne d’évoquer la présence de 10 millions d’électeurs fictifs dans le fichier électoral de la CENI, aujourd’hui en phase de consolidation, sans donner la source d’une information aussi gravissime.
Pourtant, les experts de l’OIF en charge de l’audit du fichier de la CENI n’ont jamais dit de telles énormités ni avancé des chiffres aussi effrayants dans le rapport sanctionnant leur mission. Au demeurant, il y a à conclure que le manifeste en présence en rajoute visiblement à la surenchère politicienne, en lieu et place de la décrispation tant recherchée.
Alors qu’ils qualifient d’hérésie la thèse de Jean Cyrus MIRINDI, ces universitaires ne s’empêchent pas eux-mêmes d’en débiter une plus grave. La haute trahison qu’ils évoquent dans leur déclaration est une infraction contre les institutions de la république. Elle est inscrite noir sur blanc dans le code pénal congolais.
Cependant, nulle part dans l’arsenal juridique que constitue notre droit positif, il n’est prévu aucune disposition de la loi qui interdit formellement à un président de la république, ayant à son actif deux mandats consécutifs, de briguer un nouveau mandat, sous peine de poursuite pénale pour haute trahison.
Briguer un mandat public est un acte individuel qui s’appuie sur la pleine liberté constitutionnelle reconnue à chaque citoyen, y compris à ceux répertoriés dans les critères d’éligibilité de la loi électorale. Si Joseph KABILA se décide de solliciter un nouveau mandat, c’est d’abord en tant que citoyen libre activant son autonomie de volonté. Il n’aura pas besoin d’engager sa veste de président de la république en signant une ordonnance à cet effet.
Et en cas de contestation, seule la cour constitutionnelle a compétence de trancher sur la question. La seule sanction prévue reste l’invalidation de la candidature en cas d’inégibilité. Pas plus. Il en est ainsi des autres juridictions en ce qui concernent les candidats aux autres scrutins. Sauf si le dossier contient des faux en écriture, par exemple un passeport falsifié, le procureur de la république peut être saisi à l’effet d’ouvrir une information judiciaire.
DERIVE ANTIDEMOCRATIQUE ET INTOLERANCE POLITIQUE
C’est une dérive antidémocratique que de penser que les élections du 23 décembre 2018 sont une simple formalité destinée à remplacer le régime de Joseph Kabila par un autre sur la base d’une présidence tournante que la constitution du 18 février 2006 n’a jamais prévue. Cette manière de présenter les choses participe de l’idée que l’opposition, du reste à la solde de leurs maitres impérialistes et néocolonialistes, prépare plus une vaste campagne de contestation de résultats des prochaines élections, que de les affronter pour espérer gagner honnêtement.
Ainsi, tous les moyens que l’actuelle coalition dirigée par Joseph KABILA entend fédérer légalement en vue d’une victoire des forces nationalistes sont considérés par ce conglomérat des réactionnaires de l’opposition, toute chapelle confondue, comme les préparatifs d’un coup d’État constitutionnel. Autrement dit, le 23 décembre 2018, la CENI doit proclamer la victoire de l’actuelle opposition. Faute de quoi, il s’agira d’un coup d’État. On n’a pas besoin d’être prophète pour être plus avisé.
N’est-ce pas vouloir une chose et son contraire que d’évoquer la mise en place d’une transition citoyenne, principe que notre constitution n’a pas organisé dans ses dispositifs. Voilà une autre hérésie des 106 universitaires. Comment y arriver sans violer la loi fondamentale, pour être plus précis sans passer par un véritable coup de force. Une « transition citoyenne », n’est que la version autrement habillée de la fameuse « transition sans Kabila », dont on connait les défenseurs acharnés, soutenus en sourdine par des VRP de l’impérialisme et le néocolonialisme, notamment Didier Reinders, Herman Cohen, Georges Sorros et bien d’autres.
DE LA PERTINENCE DE LA THÈSE DE JEAN CYRUS MIRINDI
D’abord, dans toutes ses interventions, le chercheur Jean Cyrus MIRINDI n’a jamais parlé de 3eme mandat, du reste, nullement prévu dans la constitution du 18 février 2006, mais plutôt du deuxième et dernier mandat au profit de l’actuel chef de l’État sous le régime de la loi du 20 janvier 2011. Ensuite, au lieu de faire parler leur cœur avec la charge psychologique qu’indui la haine viscérale envers la personne du président Joseph KABILA, les 106 universitaires auraient fait mieux de remuer un peu plus leur cerveau pour la meilleure compréhension de l’opinion de leur opposition à la thèse. En réalité, l’éclairage qui se dégage de l’analyse de Jean Cyrus MIRINDI nous invite à recourir au droit comparé au-delà de la pertinence des enseignements tirés de la jurisprudence des autres pays et mentionnée avec raison par Jean Cyrus MIRINDI dans le développement de sa thèse.
Voici ce que dit l’article 6 de la constitution française en vigueur : al 1. « Le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. » al 2 « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. » al 3 « Les modalités d’application du présent article sont fixées par une loi organique. » De l’autre côté, la disposition équivalente dans la constitution du 18 Février 2006 stipule : Article 70 al 1 « Le Président de la République est ÉLU AU SUFFRAGE UNIVERSEL DIRECT POUR UN MANDAT DE CINQ ANS RENOUVELABLE UNE SEULE FOIS. ».
NOTRE CONSTITUTION ET SES COPIERS-COLLERS MAL ADAPTES
La première observation met en exergue le principe de la limitation à deux mandats consécutifs dans les deux constitutions respectives. La deuxième observation fait ressortir une nette différence dans la lettre et l’esprit de deux textes. L’alinéa 1 de l’article 70 de la constitution du 18 février 2006 combine les deux alinéas 1 et 2 de l’article 6 de la constitution française.
Il ne s’agit pas d’une simple formulation sémantique sans conséquence dans l’intelligence de deux articles comparés. Bien au contraire. Le texte français a le mérite de la clarté en ce que la limitation à deux mandats présidentiels est le principe absolu, général et incontournable édicté dans la constitution française du 4 octobre 1958, tel qu’il n’a aucun lien de cause à effet avec la matrice du régime juridique de l’élection du président de la république.
Autrement dit, quel que soit le mode ou les modalités ou encore des conditions d’accession à la présidence de la république au regard de toute modification raisonnable qui interviendrait par la suite, un élu n’a droit qu’à deux mandats consécutifs. Point-barre. Si telle avait été stipulé notre constitution, la thèse du chercheur Jean Cyrus MIRINDI serait à mon avis sans objet, ou du moins n’aurait pas eu sa raison d’être.
FAUTE D’ARGUMENTS CONTRAIRES, LE DEBAT SUR LA THESE DE JEAN CYRUS MIRINDI EST CLOS
Ainsi, l’intelligence de l’article 6 de la constitution française ne me parait pas identique à celle de l’article 70 al 1 de notre constitution qui lie l’avènement d’un mandat à la magistrature suprême au régime juridique de l’élection présidentiel, le deuxième mandat étant celui qui se renouvelle une seule fois (en conformité au premier). La thèse de Jean Cyrus MIRINDI met en avant le fait qu’on ne renouvelle que ce qui est identique au premier.
Autrement dit, le nombre de mandats possibles accordé à un président élu est calé dans un cycle de deux mandats consécutifs, appelés à demeurer identiques et immuables dans la forme et dans les conditions d’accession (Art. 220). Le deuxième mandat devant être obtenu (RENOUVELÉ) conformément au précédent. Dès lors que les règles du jeu constitutionnellement verrouillés par l’article 220 changent dans l’intervalle de deux mandats consécutifs, le deuxième mandat n’est plus un renouvellement de mandat au sens de l’art 70 al 1, mais le démarrage d’un autre cycle de deux mandat dans les conditions d’accession différente. Il n’y a aucune justification scientifique et aucune logique juridique à penser que le deuxième mandat d’un cycle verrouillé (Voir art. 220), tel qu’autorisé à l’article 70 al 1, puisse se renouveler différemment par rapport au précédent sans incidence et effet sur le comptage de mandat autorisé.
Voilà le débat posé par le Chef de travaux, Jean Cyrus MIRINDI, pour lequel nous attendions des réponses juridiques de la part de 106 universitaires qui ont simplement versés dans la spéculation et les insultes, en lieu et place d’une réflexion scientifique. 106 universitaires, dont des éminents constitutionnalistes et juristes, pour n’accoucher que des slogans politiques d’une rare violence, il n’y a rien de plus ridicule. Le débat sur la thèse de Jean Cyrus MIRINDI est donc définitivement clos.
Daniel MAKILA KANTAGNI
Juriste et analyste politique