Tout commence par un rapport. Publié sans tambour mais avec fracas, le document du Centre de Recherche en Finances Publiques et Développement Local (CREFDL) prétend lever le voile sur de prétendues irrégularités dans l’exécution du Programme de Développement Local des 145 Territoires (PDL-145T). Très vite, il fait parler de lui. Trop vite, peut-être.
Car au-delà de ses accusations alarmistes – surfacturations, malversations, projets fantômes – ce rapport s’appuie sur une méthode que plusieurs experts jugent, au mieux, fragile, au pire, biaisée.
Un rapport sans ancrage, sans dialogue, sans transparence
La première question qui s’impose est celle de la méthode. Aucune rencontre avec la CFEF, l’un des trois bras opérationnels du programme. Aucun échange avec les acteurs locaux. Aucune publication préalable d’une méthodologie ni de termes de référence.
En somme, aucun respect du contradictoire, pourtant fondamental dans tout processus d’audit ou de contrôle citoyen.
L’opacité du CREFDL lui-même interroge : pas de siège identifiable, pas de références institutionnelles claires, uniquement un contact téléphonique et une adresse e-mail. Une non-conformité manifeste à la Loi 004/2001 sur les ASBL, qui impose pourtant un minimum de traçabilité pour les organisations prétendant œuvrer dans l’espace public.
Des accusations fortes, mais des faits têtus
Les accusations ne manquent pas : mauvaises procédures, manque de transparence, enrichissement illicite. Mais les faits, eux, racontent une autre histoire.
- Les marchés publics ont été passés dans les règles, selon la Loi n°10/010, avec toutes les publications officielles exigées.
- Les prix pratiqués sont alignés – voire en dessous – des estimations techniques de référence, notamment pour les bâtiments équipés.
- Les fonds sont traçables, et leur usage validé par des audits croisés (IGF, Cour des comptes, cabinets indépendants).
- Les populations locales ne sont pas restées à l’écart : consultations, réunions de terrain, implication des chefs coutumiers et des administrateurs territoriaux témoignent d’une participation réelle, documentée.
Un agenda qui dépasse la reddition des comptes ?
Alors, que cherche ce rapport ? Et surtout : à qui profite-t-il ?

Dans un pays où chaque projet d’envergure devient vite un enjeu politique, le PDL-145T, fleuron du mandat présidentiel en matière de développement territorial, n’échappe pas à la règle. Saper sa crédibilité, c’est aussi fragiliser une politique publique emblématique, dont le taux d’exécution dépasse aujourd’hui 86 % dans certaines provinces comme le Kwilu, le Kwango ou le Kongo Central.
La vigilance oui, le sabotage non
Il est sain – et nécessaire – que la société civile garde un œil critique sur les politiques publiques. Mais la critique exige rigueur, probité, et honnêteté intellectuelle. Le contrôle citoyen n’est pas une entreprise de communication. Ce n’est pas non plus un prétexte pour nourrir des récits à charge, déconnectés des réalités de terrain.
La RDC ne manque pas de défis. Elle n’a pas non plus besoin d’être tirée vers le bas par des rapports mal ficelés, publiés à la va-vite, sans dialogue ni responsabilité.
Le pays a besoin d’un contrôle citoyen adulte, crédible, ancré, loyal dans sa mission de veille. Un contrôle qui renforce, pas qui affaiblit. Un contrôle qui éclaire, pas qui obscurcit.
Delphin tambwe