Goma, 15 avril 2025 – Confrontée à une impasse logistique majeure dans l’Est de la République Démocratique du Congo, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) envisage désormais une solution diplomatique inattendue : faire transiter ses troupes par le Rwanda pour procéder à leur retrait. Le bloc régional sud-africain a officiellement saisi Kigali afin d’ouvrir un couloir terrestre en raison de l’inaccessibilité persistante de l’aéroport international de Goma.
Une option diplomatique rendue inévitable par les blocages à Goma
Le retrait des troupes sud-africaines, tanzaniennes et malawites déployées dans le cadre de la mission SAMIDRC (SADC Mission in the Democratic Republic of Congo) est compromis par la fermeture prolongée de l’unique piste fonctionnelle de l’aéroport de Goma. Les chefs d’état-major des trois armées concernées ont donc appelé à une solution diplomatique rapide, soulignant que le temps presse pour organiser un redéploiement sécurisé et ordonné.
Cette décision fait suite à une réunion stratégique tenue le 11 avril 2025 au siège de la Tanzania People’s Defence Force (TPDF), où étaient présents :
- Le général Jacob John Mkunda (Tanzanie),
- Le général Rudzani Maphwanya (Afrique du Sud),
- Le général Paul Valentino Phiri (Malawi).
Les trois commandants ont recommandé au secrétariat exécutif de la SADC d’ouvrir des discussions directes avec les autorités rwandaises pour envisager un retrait terrestre via le territoire de Kigali.
Un passage diplomatiquement délicat, mais logiquement inévitable
La réunion d’urgence du 14 avril à Dar-es-Salaam, dirigée par le professeur Kula Theletsane, responsable de l’Organe de la SADC pour la politique, la défense et la sécurité, a validé cette option. Si elle soulève des sensibilités politiques dans la région, elle apparaît aujourd’hui comme le seul scénario réaliste pour éviter un enlisement militaire à Goma.
Selon des sources militaires sud-africaines, les contingents de la SAMIDRC convergeront vers la ville de Chato en Tanzanie, point de rassemblement logistique à partir duquel chaque pays organisera le rapatriement de ses soldats et matériels vers ses frontières respectives.
Une mission régionale en fin de mandat dans un contexte de crise persistante
Déployée depuis fin 2023, la mission de la SADC avait pour objectif de soutenir les forces armées congolaises (FARDC) dans la lutte contre les groupes armés actifs dans l’Est du pays. Malgré plusieurs opérations conjointes, la situation sécuritaire demeure instable, notamment dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri.
Le départ de la mission intervient à un moment critique, où la pression militaire et politique autour de la région des Grands Lacs reste élevée. De nombreux observateurs soulignent que le retrait prématuré des forces régionales pourrait créer un vide sécuritaire, susceptible d’être exploité par des groupes armés encore très actifs.
Kigali face à une décision régionale importante
Le recours au Rwanda, partenaire stratégique mais également acteur sensible dans la crise à l’Est, pose des questions géopolitiques délicates. Plusieurs voix s’interrogent sur la capacité de Kigali à accepter de jouer ce rôle logistique sans contrepartie diplomatique, dans un contexte de tensions récurrentes avec Kinshasa.
Pour la SADC, il s’agit d’un test de coopération régionale, au nom de la stabilité. Le feu vert du Rwanda pourrait permettre une sortie maîtrisée de la SAMIDRC, tout en envoyant un signal fort en faveur du dialogue régional. Mais la réponse officielle de Kigali n’avait pas encore été rendue publique au moment de la rédaction de cet article.