Dans la première partie de notre dossier publié la semaine dernière sur la fièvre hémorragique d’Ebola, nous nous sommes intéressés aux origines de cette maladie causée par un virus mortel apparu depuis 1976 dans l’ex province du grand Equateur, précisément à Yabuku tout prêt de la rivière Ebola, d’où tire le nom du virus. Et nous avons souligné que cette fièvre fait peur à toute l’humanité, pourtant, son virus vit depuis des décennies dans les massifs forestiers du bassin du Congo dans un porteur ou plusieurs porteurs inconnus.
Aussi, nous avons fustigé que depuis lors, cette maladie fait le va-et-vient sur le sol congolais sans que personne ne l’arrête, en causant chaque fois, d’énormes pertes en vies humaines. Et des milliards de dollars américains de la communauté des nations sont mis à contribution pour lutter aux différents épisodes de l’épidémie, au nom de la solidarité internationale, et surtout, par peur d’une propagation à l’échelle internationale. Une propagation qui a déjà causé la perte de plus de 11.300 personnes en Rdc, en Afrique et dans le monde.
Nous avons enfin dénoncé ce qui est le plus étonnant dans toute cette histoire de la maladie à virus Ebola, c’est le fait qu’au niveau de la Rdc, pays où vivent les vecteurs porteurs de cette fièvre hémorragique, les décideurs ne se sont jamais pressés pas dans la recherche d’une solution durable.
Et dans le cadre de cette seconde partie de notre dossier, il nous importe de pouvoir scruter la problématique ou la complicité de la maladie avant de proposer des pistes de solution, avec le concours des experts environnementaux. D’abord, évoquons ce questionnement des observateurs qui se situe autour du pourquoi de la négligence et de la banalisation, de la part des responsables politiques congolais de toutes les époques, face aux épidémies qui causent pourtant d’énormes pertes en vies humaines.
Négligence manifestée entre autres par le refus d’initier un programme d’inventaire généralisé de la biodiversité cachée dans tous ces écosystèmes, surtout dans les massifs forestiers que le pays regorge ; et le manque d’un plan d’aménagement de toute l’étendue du pays. « En mettant en place un programme d’inventaire hautement scientifique et un plan national d’aménagement conforme, les décideurs congolais contribueraient énormément dans la recherche d’une solution durable dans l’éradication de ce virus Ebola et de bien d’autres comme celui découvert il y a quelques années dans les forêts du Kongo-central, et qui se nomme « Bacongo », virus que l’INRB a confirmé », soutient l’Ong ESSF (Environnement sain sans frontières).
Des idées pour éradiquer les voies de contamination
Les experts de l’Ong susmentionnée ont toujours développé la thèse selon laquelle, la forêt du Bassin du Congo réserve encore trop de surprises désagréables, suite aux changements climatiques qui perturbent toute l’humanité, et sa biodiversité qui reste en grande majorité inconnue. Selon eux, il n’y a que 1,9 millions d’espèces qui sont connues à ce jour, alors que, entre 10 à 100 millions d’autres restent encore inconnues. Parmi ces espèces inconnues, l’on cite des microbes qui occupent une grande place, selon des dernières statistiques de l’année 2018.
Face à un ennemi puissant comme cette fièvre à virus d’Ebola qui a un taux de mortalité très élève (autour de 77%), l’on estime qu’il est plus qu’urgent à ce que toutes les parties prenantes (externes et internes) impliquées dans la recherche d’une solution durable, se tiennent main dans la main. Notamment, en élaborant des stratégies et en disposant des moyens conséquents pour éradiquer une fois pour toute cette pandémie de la Rdc et de tous les massifs forestiers du bassin du Congo et ceux qui l’environnent.
En outre, l’Ong ESSF se dit préoccupée du fait que jusqu’aujourd’hui, le monde scientifique ne maitrise pas un grand nombre de paramètres concernant cette maladie à virus Ebola. Et souvent dans ce cas, souligne-t-elle, toutes sortes de spéculations font surface.
« Mais ce qu’il faut considérer est que toutes voies de contamination sont pour la plus part inconnues, comme l’est la durée exacte de l’incubation. Les animaux hôtes primaires qui constituent les réservoirs potentiels de ce virus mortel ne sont pas connus jusque-là, les chauves-souris et les grands singes ont fait l’objet de plusieurs recherches qui ont connues souvent un résultat négatif », indique-t-elle. Et d’ajouter : « La procédure du passage du virus de l’hôte primaire (animal) à l’hôte secondaire (chasseur ou pêcheur), et surtout la durée de ce virus dans les spermes et autres sécrétions féminines peut aller au-delà d’une année ».
Pour l’Ong, cette inquiétude est aussi justifiée par la voie de transmission de la maladie entre les humains qui n’est pas connue en totalité. Car, explique-t-elle, si la maladie ne se transmet que par les sécrétions, vomissement, transpiration…, bref, par le contact avec la personne malade, pourquoi les soignants occidentaux dans leurs infrastructures sanitaires bien équipées finissent par contracter le virus ? Cas de l’épidémie de 2014, qui avait étalée les faiblesses du système sanitaire de l’Afrique en général et celle de l’Afrique de l’Ouest en particulier.
Devant toutes ces incertitudes, l’Ong ESSF pense qu’il est possible qu’il y ait plusieurs vecteurs porteurs primaires qui ne seraient pas nécessairement les animaux terrestres. Ils peuvent être des plantes carnivores, certains oiseaux, voir des poissons ou insectes. Pour cette source, un autre élément à prendre en compte est la sensibilité de la Rdc face à ce virus.
« Il est rare que ce virus apparaisse dans un coin de l’Afrique sans qu’il laisse ses traces en Rdc pour la même périodicité, comme l’on a constaté lors de la grande épidémie qui a dernièrement secoué l’Afrique de l’Ouest. C’est la raison pour laquelle l’Ong ESSF, propose cette analyse au monde scientifique et surtout aux décideurs, aux chercheurs modernes et traditionnels, sans oublier les communautés de la Rdc (les premières concernées) de pouvoir s’impliquer toutes dans la recherche d’une solution durable en Rdc, en particulier, et pour toute l’humanité d’une manière générale », note-t-on dans le communiqué nous parvenu.
Quant aux pistes de solution face à Ebola
Pour l’Ong ESSF, en considérant cette recrudescence de la maladie à virus Ebola en Rdc, les Congolais dans leur ensemble, commençant par ses dirigeants, c’est-à-dire ceux qui ont la gestion de la chose publique au quotidien, devraient prendre le taureau par les cornes en déclarant à la face du monde que la Rdc est une zone pandémique de la maladie à virus Ebola. Et à ce titre, tirer toutes les conséquences qui s’imposent.
Entre autres, disposer d’une équipe multisectorielle permanente (pas seulement des médecins et autres corps soignants) prête à agir à tout moment. Cette équipe doit être composée des médecins, pharmaciens, biologistes, informaticiens, psychologues, environnementalistes, chasseurs expérimentés, pécheurs et défenseurs des coutumes.
Il faut également la redévabilité à la place d’une gestion de crise qui se résume à la réactivité qui ne sait pas anticiper et rendre compte au quotidien ; initier des recherches sous forme d’un aménagement de toute l’étendue du territoire pour connaitre en détails les véritables réservoirs de ce virus hémorragique proche de celui de Marburg qui est moins virulent et cause moins des dégâts.
Mais aussi, le pays doit disposer des centres (bien équipés) de contrôle dans toutes les provinces. Ces centres s’occuperaient de la gestion et de prévention des maladies qui anticipent les événements au lieu de les subir. C’est le modèle des centres fédéraux américains de contrôle et prévention des maladies(CDC), ayant un projet de plusieurs années pour l’Afrique centrale dans la lutte contre les maladies transmises directement de l’animal à l’homme. C’est peut être l’instabilité politique dans la région qui retarde ce projet.
Une autre conséquence qui s’impose est celle d’empresser les deux chambres du Parlement pour qu’au prochain mandat législatif, de procéder au vote de la loi sur la salubrité de l’air, de la loi sur la salubrité de l’eau potable, de la loi sur la protection des mammifères marins et continentaux, de la loi sur les animaux potentiels réservoirs au virus Ebola et autres, de la loi sur les reptiles et tous les animaux fragiles, de la loi sur les espèces halieutiques, et biens d’autres lois semblables.
Il faudrait également doter la République d’une agence de protection de l’environnement, comme il est le cas dans beaucoup de pays au monde. La Rdc devrait aussi créer un fonds semblable à celui qui a été mis en place par la Banque mondiale (PEF) pour faire face aux épidémies et autres catastrophes avant de compter sur la solidarité internationale, comme il est le cas chaque fois qu’une épidémie surgit au pays. Mais aussi de disposer d’une équipe de scientifiques qui ne s’occupe que de la recherche sur le vaccin qui sauverait plus de 80 % de ceux qu’on va administrer.
La liste de ces recommandations et les pistes des solutions suggérées par l’Ong ESSF seront exploitées dans nos prochaines éditions. Mais le souci de cette Ong de droit congolais qui milite pour la protection de l’environnement, indique-t-on, est de tirer la sonnette d’alarme pour que l’environnement soit bien géré, afin qu’il procure au pays les biens et services dont le peuple congolais a besoin, et non les Virus qui le tue.
« Ces virus Ebola peuvent exister, mais si nous humains respectons les normes en sensibilisant les chasseurs et les autres exploitants des produits forestiers du danger qui est permanant dans nos forets, il y a lieu de vivre sans être inquiété par la maladie. Nous voulons aussi éveiller et réveiller nos consciences en disant que nous ne sommes qu’au début des effets des changements climatiques, nous allons faire face à beaucoup d’autres maladies inconnues, mais aussi à une recrudescence accrue de celles qui existent déjà. D’où, il faut des actions en synergie pour des solutions durables », démontre l’Ong ESSF dans sa contribution scientifique.
Elle prône finalement la sensibilisation citoyenne de la population pour la protection de l’environnement.
Lepetit Baende et Alain Botoko (président Ong ESSF)