Un nouveau scandale financier secoue le ministère de la Justice. Au cœur de la tourmente : Constant Mutamba, ministre de la Justice et Garde des Sceaux, accusé d’avoir ordonné le paiement de 19,9 millions de dollars à la société ZION-CONSTRUCTION pour la construction d’une prison à Kisangani… deux jours seulement après la signature du contrat.
Un ordre de paiement éclair aux allures de montage douteux
Un ordre de paiement daté du 16 avril 2025, signé de la main même de Constant Mutamba, a fuité sur les réseaux sociaux et dans la presse. Il s’adresse à la Rawbank, l’une des principales institutions bancaires du pays, et l’instruit de virer 19.900.000 dollars américains au profit de la société ZION-CONSTRUCTION, adjudicataire du marché pour la construction d’un centre pénitentiaire à Kisangani.
Ce qui interpelle : le contrat n’a été signé que deux jours auparavant, le 14 avril 2025. Un délai inhabituellement court, qui soulève de graves suspicions sur la transparence, la diligence raisonnable et le respect des procédures de décaissement des fonds publics.
Où sont les études techniques ? Où est le plan de décaissement échelonné ?
D’ordinaire, tout projet d’infrastructure publique d’une telle envergure suit une série d’étapes obligatoires : étude de faisabilité, évaluation technique, ventilation budgétaire, calendrier de décaissement progressif, suivi par les corps de contrôle (IGF, Cour des comptes, etc.). Or, dans ce dossier, aucune de ces garanties ne semble avoir été respectée.
Un haut cadre de l’Administration des Finances, sous anonymat, confie :
« Aucun décaissement de cette ampleur ne peut – ni ne doit – se faire en un seul bloc, sans audit technique préalable ni autorisation formelle du Budget et du Plan. Ici, le soupçon de détournement est plus que sérieux. Il est presque structurel. »
ZION-CONSTRUCTION : entreprise miracle ou société écran ?
Autre point d’ombre : le profil de ZION-CONSTRUCTION, entreprise quasi inconnue du grand public et dont le portefeuille de projets réalisés reste introuvable. Selon plusieurs sources concordantes, l’entreprise n’a aucun passé significatif dans les grands travaux publics et n’est pas référencée dans les bases de données des marchés publics comme attributaire d’autres marchés d’infrastructure carcérale.
La rapidité de l’attribution du marché et du paiement alimente ainsi les soupçons de connivence, de favoritisme ou de montage frauduleux.
L’IGF interpellée, le silence du ministère inquiète
Alors que l’Inspection Générale des Finances (IGF) a récemment intensifié ses contrôles sur les marchés publics, aucune réaction officielle n’a encore été enregistrée concernant ce dossier explosif. Le ministère de la Justice, lui, garde un silence assourdissant face à ces révélations, alimentant un climat de suspicion et d’indignation au sein de l’opinion publique.
Un test de vérité pour l’État de droit
Le présumé détournement de 19 millions de dollars intervient dans un contexte où le gouvernement vante sa lutte contre la corruption et prône la redevabilité dans la gestion des deniers publics. L’affaire Mutamba constitue ainsi un test majeur pour la crédibilité du régime : laisser passer ou frapper fort ?
L’opinion attend des réponses. Pas des communiqués d’autojustification, mais des enquêtes concrètes, des suspensions provisoires, et des poursuites si les faits sont avérés.
Car si la construction de prisons devient un prétexte pour piller les caisses de l’État, alors c’est tout l’appareil judiciaire congolais qui est tourné en dérision.