- Un séisme politique en perspective ?
L’annonce tonitruante du retour imminent en République démocratique du Congo de l’ancien président Joseph Kabila Kabange a provoqué une onde de choc à travers le paysage politique national, et plus particulièrement au sein de son parti, le Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD). Ferdinand Kambere, Secrétaire permanent adjoint de cette formation politique influente, n’a pas tardé à exprimer l’effervescence et l’optimisme qui animent les rangs du parti face à cette nouvelle.
Lors de son passage remarqué sur les ondes de Top Congo FM, Kambere a qualifié ce retour d’un événement porteur de « joie » pour l’ensemble du peuple congolais, insistant sur l’attente palpable de la population de revoir celui qui a dirigé le pays pendant dix-huit années.
Cette réaction passionnée de l’un des cadres dirigeants du PPRD met en lumière l’impact considérable que continue d’exercer Joseph Kabila sur la scène politique congolaise, même après une période d’absence prolongée et un exil auto-imposé en Afrique du Sud. L’enthousiasme de Kambere, loin d’être isolé, semble refléter un sentiment généralisé au sein du PPRD, y voyant potentiellement un tournant majeur dans leur stratégie de reconquête, démocratiquement, du pouvoir et une réponse aux défis sécuritaires et institutionnels croissants auxquels le pays est confronté.
La décision de Joseph Kabila de rompre le silence qu’il observait depuis son départ du pouvoir et son installation en Afrique du Sud, officialisée par une déclaration écrite rendue publique ce mardi 8 avril, intervient dans un contexte national particulièrement préoccupant.
Justifiant son retour par la « gravité de la situation sécuritaire et institutionnelle » et sa « volonté de contribuer à la recherche d’une solution à la crise que le pays traverse actuellement », l’ancien président se positionne comme un acteur incontournable face aux défis multidimensionnels auxquels la RDC est confrontée.
Son diagnostic sans concession d’une situation « hors de contrôle » et d’une « déliquescence qui gangrène tous les secteurs de la vie nationale » souligne la profondeur de son inquiétude et la conviction de la nécessité d’une intervention de sa part.
Le choix symbolique de commencer son retour par la partie orientale du pays, région en proie à une instabilité chronique et à des conflits armés persistants, témoigne d’une volonté affichée de s’attaquer en priorité aux zones les plus critiques et de se présenter comme un artisan potentiel de la paix et de la sécurité. Cette démarche stratégique, précédée de consultations avec divers acteurs régionaux, politiques et sociaux, tant congolais qu’étrangers, confère à son retour une dimension politique et sécuritaire de premier plan, suscitant à la fois espoir et appréhension quant à ses intentions réelles et à l’impact de sa présence sur l’équilibre des forces en présence.
Cependant, l’annonce du retour de Joseph Kabila, bien que saluée avec ferveur par ses partisans à l’instar de Ferdinand Kambere, soulève inévitablement une myriade de questions et de spéculations quant à ses motivations et à ses objectifs à long terme.
Intervenant dans un climat politique déjà tendu, marqué par le rejet catégorique du PPRD de l’offre de participation à un gouvernement d’union nationale formulée par le président Félix Tshisekedi, ce retour pourrait bien redistribuer les cartes sur l’échiquier politique congolais.
L’une des interrogations les plus brûlantes concerne une éventuelle alliance, même tacite, avec l’AFC/M23 de Corneille Nangaa, un groupe armé significatif opérant dans l’est du pays.
C’est dans l’imaginaire de ceux qui sont à la fois « problèmes » et « solutions », laisse-t- on entendre dans l’entourage de l’ancien président !
Le retour de Joseph Kabila, survenant au lendemain de la rentrée politique du PPRD et de son positionnement ferme dans l’opposition, s’annonce donc comme un événement charnière, dont les implications profondes pour l’avenir politique et sécuritaire de la République démocratique du Congo devront être scrutées avec la plus grande attention. L’enthousiasme affiché par Ferdinand Kambere, bien que compréhensible au sein de son camp, contraste avec les incertitudes et les appréhensions qu’un tel retour suscite au sein d’une opinion publique divisée et d’une communauté internationale attentive aux développements de la situation en RDC.
David MUTEBA KADIMA/Les Points Saillants