Au Katanga, on ne décolère pas. Le mépris affiché par le régime de Kinshasa vis-à-vis des Katangais est désormais un fait établi. A Likasi, personne n’ignore que l’honorable Patricia Nseya Mulela, élue UDPS/Tshisekedi de Likasi, qui a été choisie comme Rapporteur de la CENI est bel et bien originaire du Kasaï. Aux yeux des Katangais, au-delà de la supercherie, l’alignement de cette élue parmi les originaires du Haut Katanga est une véritable provocation.
C’est donc à la surprise générale des filles et fils de la province du Katanga qu’aucun des leurs n’a été repris au Bureau et dans la plénière de la CENI. Le choix d’une originaire du Kasaï pour compte du Katanga a achevé de convaincre les observateurs de la légèreté avec laquelle la commission paritaire dirigée par l’honorable Mbata a traité les dossiers individuels des candidats. Et plus encore, sur la complicité avérée de l’honorable Mboso à la magouille visant à placer la CENI sous la coupe du diktat d’une seule province.
L’honorable Mbata et sa commission n’ont eu cure de porter l’eau au moulin de tous ceux qui considèrent que le processus électoral est pris en otage par les originaires du grand Kasaï. A leurs yeux, il ne fait plus aucun doute que l’examen des soi-disant compétences nationales a amené à placer la responsabilité de l’intégralité du processus électoral entre les mains de ses co-régionnaires. Les preuves sont devenues accablantes. Au niveau de la Justice, les hauts magistrats de la Cour Constitutionnelle et de la Cour d’Appel sont originaires du Kasaï. Sans parler du Ministre de la Justice qui elle aussi est originaire du Kasaï. Quant au pouvoir organisateur des élections, il est placé sous l’autorité du ministre de l’Intérieur originaire lui aussi du Kasaï. En ce qui concerne le financement du processus électoral, le ministre des Finances et Mme la Gouverneure de la Banque Centrale sont eux aussi tous deux originaires du Kasaï. Et depuis, clou du spectacle de prise de contrôle du nouveau cycle électoral, le Président de la CENI, Denis Kadima Kazadi et la rapporteur Patricia Nseya qui devront signer le procès-verbal des résultats des prochaines élections et en assurer la publication sont eux aussi tous deux du Kasaï. La boucle est bouclée ! Les prochaines élections congolaises seront kasaïennes !
Dans un pays où le tribalisme (depuis Mobutu) n’a jamais pu être aboli et se porte même de plus belle, la représentation nationale sans négliger le poids économique devrait nous guider !
Nous savons tous que le Mississippi ou la Louisiane n’ont pas le même poids nationale que la Californie…!
Pour revenir à Lubumbashi où la tension est perceptible, la colère sourd. « On aime l’argent des Katangais mais en réalité on nous méprise. Nous ne sommes qu’une vache à lait réduite à engraisser ceux qui ont pris le pouvoir », affirme un haut cadre de la SNCC qui se désole de voir la marginalisation de la province qui alloue plus de 60% des recettes de l’Etat. Sous le coup de la colère et de l’émotion, un étudiant de l’UNILU déclare ne pas comprendre pourquoi les Katangais sont systématiquement mis à l’écart de tous les centres de décision.
« C’est l’argent du Katanga qui va financer la tricherie électorale qui se prépare en 2023 avec Kadima pour qu’on continue à nous tenir en esclavage. Nos routes sont délabrées, nos hôpitaux manquent de lit et de médicaments, nos écoles sont abandonnées, les enfants n’ont pas de bancs ni de tableaux…», dit-il en montrant l’état de vétusté des infrastructures de son université et les trottoirs de Lubumbashi dont les caniveaux débordent d’immondices.
A l’évidence, l’entérinement par Christophe Mboso et les députés corrompus de l’Union Sacrée de l’honorable Patricia Nseya porte un sérieux coup à la fierté katangaise si longtemps inscrite dans l’imaginaire des Congolais, depuis l’indépendance en 1960, quand la plupart des pères de notre indépendance avaient préféré l’unitarisme destructeur en remplacement du fédéralisme constructeur (1885-1960).
Quant aux lignes rouges tracées par Moïse Katumbi en ce qui concerne la congolité ou la nécessité d’un consensus pour la CENI, Kinshasa les considère tout simplement comme les rugissements d’un lion dompté.
Aujourd’hui, sous les coups de bélier des « Kinois », les portes du Katanga sont ouvertes à l’exploitation de prédateurs venus d’ailleurs.
Reste à savoir jusqu’à quand les Katangais continueront à courber l’échine. L’avenir le dira…
Bernard Mulumba